Lettre à Guillaume Auguste Lamey, 6 octobre 1858

  • Cote de la lettre ED-IN-1858-OCT-06-A
  • Auteur Eugène DELACROIX
  • Destinataire Guillaume-Auguste LAMEY
  • Date 06 Octobre 1858
  • Lieux de conservation Paris, bibliothèque de l'INHA, collections Jacques Doucet
  • Éditions précédentes Joubin, Correspondance générale, 1936-38
    , t. IV, p. 47-48.
  • Enveloppe Non
  • Nombre de pages écrites 4
  • Présence d’un croquis Non
  • Dimension en cm 20,5x26,2
  • Cachet de cire Non
  • Nature du document Lettre Autographe Signée
  • Cote musée bibliothèque Ms. 238 pièce 42
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Transcription modernisée

 

Ce 6 octobre 1858

 

Cher et bon cousin,

Je vous écris plus tard que je n’eusse voulu : mais je suis depuis trois semaines « à la nage » dans mon grand travail de Saint-Sulpice et il m’absorbe complètement : non pas qu’il ne me laisse le temps de faire autre chose, mais c’est qu’il m’en rend incapable. Ce sont des travaux tellement fatigants pour ma frêle machine que, hors de là, je suis sous le poids de cette fatigue : au reste je m’applaudis de ma constance. J’ai donné un coup de collier qui me permettra, j’espère, de terminer l’année prochaine, non sans être obligé encore de travailler beaucoup.

Vous m’aviez annoncé que vous seriez de retour de Bade avant la fin de septembre : le temps vraiment magnifique, qui m’est en particulier si utile pour mes travaux, avait de quoi vous engager à prolonger votre voyage. Au reste, vous êtes un homme d’intérieur et vous voyagez beaucoup sans sortir de votre chambre. Je plains ceux qui ne se trouvent bien que par monts et par vaux : et encore, sont-ils vraiment bien et peuvent-ils se plaire quelque part ? Ils ont le désir d’arriver et à peine sont-ils arrivés qu’ils ont le désir de retourner.

Je vais, pour mon compte, suspendre par force mes travaux. Les jours vont devenir sombres et de plus, je serai forcé de retourner encore à Champrosay pour des petits travaux à exécuter avant l’hiver. Je suis charmé que vous ayez approuvé mon coup de tête : je veux parler de ma brusque acquisition à la campagne1. Il faudra bien, quand vous reviendrez par ici, que vous y veniez faire un tour avec moi, voir mon horizon et ma belle forêt, qui est comme mon parc, puisque l’entrée en est devant ma porte.

Donnez-moi des nouvelles de la manière dont vous avez supporté vos voyages et si vous envisagez que ce déplacement vous ait donné des forces pour passer l’hiver. Jusqu’à présent, je suis assez satisfait de ma santé. L’exercice forcé que je fais, suivi à propos de beaucoup de repos, me fait vraiment du bien.

Adieu, mon cher cousin, et mille tendresses de cœur.

Eugène Delacroix

 


1 Delacroix venait d’acheter la petite maison dont il était locataire depuis des années. Voir à ce sujet la lettre du 6 septembre 1858 à Pierre-Antoine Berryer.

 

Transcription originale

Page 1

 

Ce 6 oct. 1858.

 

Cher et bon cousin,

 

Je vous ecris plus tard que
je n’eusse voulu : mais je suis
depuis trois semaines à la nage
dans mon grand travail de
St Sulpice et il m’absorbe
complettement : non pas qu’il ne
me laisse [mot barré illisible] le temps de faire
autre chose : mais c’est qu’il
m’en rend incapable. Ce sont des
travaux tellement fatigants pour
ma frêle machine, que hors de
là, je suis sous le poids de cette
fatigue. au reste je m’applaudis
de ma constance : J’ai donné
un coup de collier qui me permettra

 

Page 2

 

j’espere, de terminer l’année
prochaine, non sans etre obligé
encore [mot barré illisible] de [mot interlinéaire] travailler beaucoup.

Vous m’aviez annoncé que
vous seriez de retour de Bade
avant la fin de septembre : Le
temps vraiment magnifique
qui m’est en particulier si utile
pour mes travaux, avait de quoi
vous engager à prolonger votre
voyage. au reste vous etes un
homme d’interieur et vous voya-
-gez beaucoup sans sortir de votre
chambre. Je plains ceux qui ne
se trouvent bien que par monts et
par vaux : et [mot interlinéaire] encore, sont ils vraîment
bien et peuvent ils se plaire quelque-
-part ? ils ont le desir d’arriver et
a peine sont ils arrivés qu’ils ont le

 

Page 3

 

desir de retourner.

Je vais pour mon compte suspendre
par force mes travaux. Les jours
vont devenir sombres et de plus, je
serai forcé de retourner encore
à Champrosay pour des petits
travaux à executer avant l’hiver.
Je suis charmé que vous ayez
approuvé mon coup de tête : je
veux parler de ma brusque acqui-
-sition à la campagne. Il faudra
bien, quand vous reviendrez par ici,
que vous y veniez faire un tour avec
moi, voir mon horizon et ma
belle forêt qui est comme mon
parc, puisque l’entrée en est devant
ma porte.

Donnez moi des nouvelles
de la maniere dont vous avez
supporté vos voyages et si vous
envisagez que ce deplacement vous

 

Page 4

 

ait donné des forces pour
passer l’hiver. jusqu’a présent, je
suis assez satisfait de ma santé.
l’exercice forcé que je fais, suivi
à propos de beaucoup de repos, me
fait vraîment du bien.

Adieu mon cher cousin
et mille tendresses de cœur.

EugDelacroix

 

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