Lettre à Pierre-Antoine Berryer, 02 novembre 1858

  • Cote de la lettre ED-MD-1858-NOV-02-A
  • Auteur Eugène DELACROIX
  • Destinataire Pierre-Antoine BERRYER
  • Date 02 Novembre 1858
  • Lieux de conservation Paris, musée Eugène Delacroix
  • Éditions précédentes Lacombe, 1885, p. 58 (partiellement); Joubin, Corr. gén, t. IV, p. 51 (idem).
  • Historique Acquise par le service des bibliothèques et des archives des musées nationaux avec la participation de la Société des Amis d’Eugène Delacroix auprès de la librairie Les Autographes, février 1992.
  • Enveloppe Non
  • Nombre de pages écrites 3
  • Présence d’un croquis Non
  • Format in - 8°
  • Dimension en cm 20,5x26,1
  • Cachet de cire Non
  • Nature du document Lettre Autographe Signée
  • Cote musée bibliothèque LA 31631/90
  • Données matérielles pliée en 3
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Transcription modernisée

Ce 2 nov. 1858

Mon cher cousin, l’aimable tableau que vous me faites de ces amis trinquant autour d’une table hospitalière1, ne me prépare guère à ce que je vais trouver, mais j’espère que le souffle empoisonné des cours ne m’enlèvera pas à mes solides affections. Je ne porte pas encore bien profondément les marques de ce collier dont je suis attaché, n’ayant aujourd’hui qu’une ambition qu’aucun homme ne peut satisfaire, celle de me bien porter : mais la a a a forme ! comme dit Bridoison2.

Mettez-moi aux pieds de ces beaux yeux anonymes que quelque chose me dit être ceux de Mad. de La Grange , plus faits que beaucoup d’autres pour ajouter à mes regrets. Eh quoi ! vous l’avez déterminée à venir dans cette saison pendant que je vais faire l’apprentissage du métier de courtisan ! Et Batta encore : dites-lui que je l’embrasse et le regrette bien aussi ainsi que tous vos hôtes.

J’ai bien mis à profit le temps que j’ai passé à mon église3 sans parler de la musique qu’on fait dans ce lieu là et auprès de laquelle toutes les autres sont bien minces. Je travaillais le double, les jours de messes chantées. Mon chariot était passablement embourbé et je l’ai mis en bonne voie et propre à être repris avec plaisir la campagne prochaine.

Adieu encore, mon cher cousin, je vous remercie bien de votre lettre et vous envoie tous mes profonds et dévoués sentiments

Eug. Delacroix


1 Berryer avait écrit à Delacroix le 1er novembre lui décrivant notamment les douces causeries auprès d’un grand feu Batta et de « grands et beaux yeux » entrecoupées de mélodies du violoniste (Paris, musée Eugène Delacroix LA 31631/89).

2 Don Gusman Brid’oison, juge ridicule dans le Mariage de Figaro de Beaumarchais.

3 L’église Saint-Sulpice. Delacroix travaillait à la chapelle des Saints-Anges qu’il avait été chargé de décorer en 1849.

 

Transcription originale

Page 1

Ce 2 nov. 1858

Mon cher cousin, l’aimable
tableau que vous me faites de ces
amis trinquant autour d’une table
hospitaliere, ne me prepare guère
à ce que je vais trouver : mais j’espère
que le souffle empoisonné des
cours ne [mot barré] m’enlevera pas
à mes solides affections : je ne
porte pas encore bien profondément
les marques de ce collier dont je
suis attaché
, n’ayant aujourdhui
qu’une ambition qu’aucun
homme ne peut satisfaire, celle de
me bien porter : mais la a a a
forme ! comme dit Bridoison.

Mettez moi aux pieds de ces
beaux yeux anonymes que quelque chose

 

Page 2

 

me dit être ceux de Mad. de
La Grange, plus faits que beaucoup
[mot barré] d’autres pour ajouter à mes
regrets. Eh quoi ! vous l’avez dé-
-terminée à venir dans cette sai-
-son pendant que je vais faire
l’apprentissage du métier de [mot barré]
courtisan ! Et Batta encore : dites
lui que je l’embrasse et le regrette
bien aussi ainsi que tous vos hôtes.

J’ai bien mis à profit le
temps que j’ai passé à mon eglise
sans parler de la musique qu’on
fait dans ce lieu là et auprès de
laquelle toutes les autres sont bien
minces. Je travaillais le double,
les jours de messes chantées. mon
chariot etait passablement embour-
-bé et je l’ai mis en bonne voie

 

Page 3

 

et propre à etre repris avec
plaisir la campagne prochaine.

Adieu encore mon cher
cousin : je vous remercie bien de
votre lettre et vous envoie tous
mes profonds et devoués sentiments

Eug Delacroix

 

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