Lettre à Guillaume-Auguste Lamey, 8 novembre 1856

  • Cote de la lettre ED-IN-1856-NOV-08-A
  • Auteur Eugène DELACROIX
  • Destinataire Guillaume-Auguste LAMEY
  • Date 08 Novembre 1856
  • Lieux de conservation Paris, bibliothèque de l'INHA, collections Jacques Doucet
  • Éditions précédentes Joubin, Correspondance générale, 1936-38
    , t. III, p. 343-345.
  • Enveloppe Non
  • Nombre de pages écrites 3
  • Présence d’un croquis Non
  • Dimension en cm 20,6x27,2
  • Cachet de cire Non
  • Nature du document Lettre Autographe Signée
  • Cote musée bibliothèque Ms. 238 pièce 25
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Transcription modernisée

Ce 8 novembre 1856

 

Il y a bien longtemps, cher cousin, que je n’ai eu de vos nouvelles ; je m’accuse aussi de ne vous avoir pas écrit. J’ai été, dans cette arrière-saison, à plusieurs petites excursions aux environs de Paris et à différentes reprises, qui m’ont éloigné de mes occupations1. M. Lamey votre neveu2, qui retourne pour quelque temps à Strasbourg, veut bien se charger d’un mot pour vous et je profite de sa bonne volonté. Écrivez-moi quelques mots et parlez-moi de votre santé. L’hiver s’annonce ici avec une certaine rigueur. Le froid est l’ennemi capital : Trousseau, le médecin3, me disait : « on ne meurt pas de chaud, on meurt de froid. » Pour ce qui me concerne, je m’en aperçois déjà. Je suis en train de m’organiser dans mon nouvel appartement, où des pièces plus grandes et un chauffage mal organisé me font ressentir l’inconvénient dont je me plains.

Point encore de nouvelles de notre critique de Montpellier4 : j’espère toujours que ce retard n’est pas un indice de froideur et j’ai la confiance qu’il vous comprendra pour une part très respectable dans le travail que je vous ai dit qu’il voulait faire de nouveau.

Rappelez-moi, cher cousin, au souvenir de votre famille. Pensons au moment encore éloigné malheureusement où nous pourrons nous réunir. Je vous envoie en attendant les assurances de mon profond attachement.

 

Eugène Delacroix

 

J’ai fait une assez bonne campagne à mon travail de Saint-Sulpice : le temps que j’y ai consacré n’aura pas été, j’espère, mal employé. L’hiver me force à suspendre.

 


1Occupé au décor de la chapelle des Saints-Anges de l’église Saint-Sulpice, il a, depuis sa dernière lettre du 7 septembre 1856, fait plusieurs excursions. Du 1er au 8 octobre 1856 il se rend à Ante, près de Sainte-Menehould (Marne),  pour voir son cousin Philogène Delacroix (Journal, éd. Hannoosh, t. I, p. 1035-1038). Du 11 au 21 octobre 1856, Delacroix est à Augerville-la-Rivière, près de Malesherbes (Loiret) où son ami Pierre-Antoine Berryer avait une propriété. Delacroix y fit de fréquents séjours à partir de 1844. En octobre 1856 il y retrouve Richomme (voir la note 3 de la lettre du 9 novembre 1854), Alexandre Batta, violoncelliste hollandais et ami de Berryer, et Achille de Cadillan, avocat et secrétaire de son ami (Journal, éd. Hannoosh, t.I, p. 1039-1041). Enfin, au début du mois de novembre il va quelques jours à Champrosay avec Jenny (Journal, éd. Hannoosh, t. I, p. 1042-1043)
2 Auguste-Ferdinand Lamey, fils de Jean-Ferdinand Lamey le frère de Guillaume-Auguste Lamey, est banquier à Strasbourg (Journal, éd. Hannoosh, t. II, p. 2249).
3 Armand Trousseau (1801-1867), médecin et homme politique. Après des études de médecine, il est agrégé de la Faculté de Médecine de Paris en 1827 puis médecin des Hôpitaux en 1830. Il travaille dans la lignées de ses professeurs Bretonneau et Récamier et précise et vulgarise leurs pensées à travers ses écrits. Ses ouvrages  : Traité de Thérapeuthique (1836-1839) est un succès réédité plus de trente fois et Les Cliniques médicales de l’Hôtel-Dieu (1857-1861), grand traité de médecine, est réédité jusqu’en 1931.  En 1848, Trousseau siège à l’Assemblée constituante. Il est membre de l’Académie de médecine en 1856 et commandeur de la Légion d’honneur en 1858. Trousseau est un célèbre pratricien ouvert aux techniques modernes de son époque. Il a une clientèle importante de parisiens, de provinciaux et d’étrangers. Delacroix était l’un de ses patients.
L’artiste l’avait, probablement, rencontré la première fois le 8 mars 1852 lors de son premier dîner des "dîners du second lundi", fondés par Panseron - compositeur et professeur au Conservatoire de musique - où Trousseau était convié. Ces dîners réunissaient des artistes, des musiciens, des écrivains, dont Adrien Dauzats, Paul Delaroche, Michel-Augusin Varcollier ( (Journal, éd. Hannoosh, t. I, p. 585 et t.II, p. 2351).
4 Saint-René Taillandier. Voir les notes 3 et 4 de la lettre du 26 juillet 1856 et la lettre du 7 septembre 1856.

 

 

Transcription originale

Page 1

ce 8 9bre 1856

 

Il y a bien longtemps, cher cousin
que je n’ai eu de vos nouvelles : je
m’accuse aussi de ne vous avoir pas
ecrit. j’ai eté dans cette
arriere saison à plusieurs petites excursions
aux environs de Paris et à differentes
reprises, qui m’ont eloigné de mes
occupations. Mr Lamey votre neveu
qui retourne pour quelque temps à
Strasbourg veut bien se charger d’un
mot pour vous et je profite de sa
bonne volonté. Ecrivez moi quelques mots
et parlez moi de votre santé. l’hiver
s’annonce ici avec une certaine rigueur :
Le froid est l’ennemi capital : Trousseau
le medecin me disait ; on ne meurt pas
de chaud, on meurt de froid. Pour ce

 

Page 2

qui me concerne je m’en
apperçois deja. Je suis en train de
m’organiser dans mon nouvel ap-
-partement où des pièces plus grandes
et un chauffage mal organisé
me font ressentir l’inconvenient dont
je me plains.

Point encore de nouvelles de
notre critique de Montpellier :
j’espere toujours que ce retard n’est
pas un indice de froideur et j’ai
la confiance qu’il vous comprendra
pour une part très respectable dans
le travail que je vous ai dit qu’il
voulait faire de nouveau.

Rappelez moi, cher cousin, au
souvenir de votre famille : Pensons
au moment encore eloigné malheureu-
-sement où nous pourrons nous réunir.
Je vous envoie en attendant les as-

Page 3

-surances de mon profond attache-
-ment.

EugDelacroix

 

J’ai fait une assez bonne
campagne à [mot interlinéaire] [mot barré illisible] mon travail de
St Sulpice : le temps que j’y ai
consacré, n’aura pas eté j’espère
mal employé. L’hiver me force
à suspendre.

 

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