Lettre à Henriette de Verninac, 1er mars 1820

  • Cote de la lettre ED-IN-1820-MAR-01-A
  • Auteur Eugène DELACROIX
  • Destinataire Henriette de VERNINAC
  • Date 01 Mars 1820
  • Lieux de conservation Paris, bibliothèque de l'INHA, collections Jacques Doucet
  • Éditions précédentes Joubin, Correspondance générale, 1936-38
    , t. V, p. 32-38.
  • Enveloppe Non
  • Nombre de pages écrites 4
  • Présence d’un croquis Non
  • Dimension en cm 23,2x37
  • Cachet de cire Oui
  • Nature du document Lettre Autographe Signée
  • Cote musée bibliothèque Ms. 241 pièce 10
  • Données matérielles trou au feuillet droit
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Transcription modernisée

À Madame Verninac

 

Mercredi 1er mars 1820

J’ai reçu hier soir ma chère sœur ta lettre du 23 février. Je profite des éclaircissements que je te donne sur les questions que Charles m’a transmises pour te parler de l’appartement1. Mon oncle est en pourparlers avec des personnes, pour la location du dit appartement au mois d’avril. Elles n’en veulent donner décidément que 1400 francs et il n’y a plus à débattre que le sou pour livre du portier, que cette dame n’est pas sûre de s’engager à payer. Elle doit me rendre réponse samedi. Comme je crois que dans ta note tu l’abandonnais pour 1400 francs sans la condition du sou pour livre, je crois que nous pourrons en passer par là, si la dame s’y refuse. Le bail est ce qui la retient le plus. Nous avions déjà cédé jusqu’à un bail sous seing privé, ce qui au fait est à peu près la même chose avec des personnes connues, parentes très rapprochées du duc de la Châtre2 et connues dans la maison de la duchesse de Bourbon. Ce sont les frais d’un acte par-devant notaire qui la retiennent. Comme il paraît que le mari est militaire et par conséquent exposé à changer de lieu, si enfin ils ne pouvaient se décider à faire un bail, mais sous la condition, bien entendu, de s’avertir mutuellement trois mois d’avance et de faire voir l’appartement pendant ce temps, faudrait-il le laisser ? Je n’y vois pas d’inconvénient, puisque par ce moyen on est toujours à même de refaire un autre marché plus avantageux si on le trouve, et qu’au moins on n’a à payer pendant ce temps ni impôts ni loyer en entier. Fais-moi donc savoir ce que tu penses à ce sujet.

Charles m’a donné hier la petite note où tu me fais diverses questions et je comptais t’envoyer ce petit bout de réponse avec la sienne. Voici des éclaircissements sur les choses demandées.

Mme Fortier3, Mme Oudot4, M. Laborie5 n’ont pas été payés parce que je comptais le faire en même temps pour ce que je leur dois, comme nous en étions convenus. J’avais fais quelques économies, partie sur ma rente, partie sur mes mois ; je me suis donné différentes choses nécessaires : le chapeau d’abord, mais plus anciennement une paire de bottes qui m’ont couté 25 francs6 et dont j’ai reconnu la nécessité dans cette saison à cause de la quantité de bas que je salissais. J’ai acheté quelques paires de chaussettes pour les bottes. J’ai été obligé à quelques petites dépenses au jour de l’an7, qui sont indispensables comme tu sais. J’ai reçu quelques fois chez moi le soir différents amis qui me témoignent de l’intérêt et qui me reçoivent bien chez eux. J’ai acheté une voie de bois, que je n’userai sans doute pas dans mon hiver, tu te rappelles que nous n’avions compté que pour une demi-voie. Enfin ce sublime clavecin, ma consolation dans mes soucis et qui n’est certainement pas payé trop cher8. Je ne me le serais pas encore donné sans une raison que je te vais dire. Un ami de M. Decazes, que j’ai connu chez et par Raisson, qui a connu mon père etc., se serait chargé de me faire vendre au dit sieur Decazes un petit tableau que j’allais entreprendre lorsque l’événement du 13 février est survenu9 ; le monsieur qui venait d’être nommé préfet de la Corse a reçu ordre de partir dans les deux ou trois jours qui ont suivi10, et enfin M. Decazes n’est plus ministre, adieu les projets. Je pourrais bien payer Mme Oudot4 etc. avec l’argent des peintures que tu te rappelles que j’ai faites près du palais11 et dont j’attends encore le payement. Mais j’avais destiné cet argent, si nous avions pu y joindre quelque chose, à me donner un habit et un pantalon, car celui qui m’a été fait à Angoulême est d’un drap détestable et mal teint. Fais-moi le plaisir de m’envoyer tes réflexions sur tout cela. J’oubliais de te parler du maître d’armes que j’ai depuis deux mois et demi12. Tu me diras peut-être que je pourrais m’en passer. Je crois que cela me serait difficile : cela me dégourdit un peu et cela dissipe le nuage triste qui me suit presque partout. J’ai fait des lithographies qui n’ont servi qu’à me faire faire des courses et à payer le papier et le noir de mon imprimeur13.

Je suivrai tes intentions pour la déclaration de l’appartement1. Dis-moi un peu, si les personnes qui loueront l’appartement 1400 francs n’auront pas lieu de se formaliser de ce qu’il sera imposé comme s’il était loué 1600. Tu me parles dans ta lettre des travaux très lucratifs qui auraient été faits par moi. Je ne sais où tu les as pris.

Voici les notes de Charles14.

Devoirs religieux : cet élève les remplit assez bien. Conduite : satisfaisante cette année, point de graves reproches à lui faire. Santé : fort bonne. Il suit le cours de seconde, il a en général témoigné beaucoup de bonne volonté, il a bien employé son temps et fait des progrès sensibles. Ses devoirs fourmillent encore de grosses fautes, tristes fruits d’une longue paresse, mais une application soutenue, les fera bientôt disparaître. Il y a de la facilité dans ses vers, mais trop de verbiage. Une élégante précision vaut mieux que cette stérile abondance. Le latin de ses thèmes est faible et sans couleur. Il deviendra piquant et heureux si cet élève met en usage tous ses moyens. Le grec est négligé. C’est un tort qu’il faut lui reprocher vivement. Histoire : il s’y distinguera, il n’y va pas mal. Il n’y a pas de comparaison entre Verninac de cette année et celui de l’année dernière. Il s’occupe du dessin avec assez de fruit. Signé Malleval.

Voilà je crois des notes très satisfaisantes. Tu retrouveras l’année prochaine un savant et par-dessus tout un homme bien portant. Adieu ma chère sœur, porte-toi bien. Fais bien mes amitiés à mon beau-frère et remercie-le bien pour moi de tout l’intérêt qu’il me marque dans ses lettres. Je t’embrasse tendrement.

E. Delacroix

La lettre que mon beau-frère m’avait demandé de chercher a été envoyée à M. Verninac de Souillac15.

J’ai reçu la seconde lettre de change de 136 francs.

P. S : Le valet de chambre de M. de Brancas qui était venu dans la maison m’a rappelé que mon beau-frère devait à son maître les volets de ta chambre à coucher ainsi qu’une petite porte de cave ; que le tout avait été estimé et qu’il en devait savoir le prix.

Second post-scriptum : J’ai attendu la réponse définitive de la dame pour envoyer ma lettre. Elle ne peut prendre l’appartement1. Nous allons tâcher de trouver quelque autre locataire.

Sitôt que le toupet te sera parvenu, tu m’écriras de suite s’il n’y a rien à y faire afin que je paye le coiffeur. Je ne lui ai donné que 12 francs. J’ai renouvelé l’abonnement à L’Indépendant16.

 

J’avais ménagé autant que j’avais pu l’espace, ma chère sœur, parce que je comptais n’envoyer que la feuille simple avec la lettre de Charles pour faire moins de volume. Mais comme je me suis décidé après avoir beaucoup consulté à t’envoyer ton livre par le courrier, je profite de l’occasion pour y glisser cette lettre. J’ai vu Charles aujourd’hui : il m’a dit qu’il t’avait écrit dernièrement. La cousine ne va pas trop bien. Son état m’inquiète beaucoup. Tu trouveras le toupet entre les volumes, il me paraît fort bien conditionné. Les cheveux ont été laissés un peu longs parce qu’on sera toujours à même de les couper. L’ouvrage à coûté 44 francs17 : j’ai vu plusieurs libraires et il est impossible de l’avoir à moins.

Comme je te l’ai dit dans le second post-scriptum placé en tête de cette lettre, l’appartement1 n’est point loué. Il est bien venu plusieurs personnes pour le voir. Mais il ne paraît pas qu’il a[it] convenu. [He]ureusement, nous avons encore un mois et je ne négligerai aucun moyen de le louer. Ce paquet t’arrive par le courrier et non par sous bande comme la poste envoie les brochures. On prend cinq centimes par feuille d’impression. Il y a 500 pages au volume l’un dans l’autre et, dans un in-8°, la feuille d’impression ne contient que huit pages. Tu vois que cela aurait fait plus de trois francs au volume, et le paquet entier ne coûtera que cette somme18.

Adieu ma chère sœur, porte-toi bien, je t’embrasse bien, ainsi que mon beau-frère. S’il y a quelque chose de nouveau sur le procès19, tu m’en instruiras lorsque tu m’écriras.

Je t’écris de la poste et la note où tu me faisais tes questions est à la maison. J’y ai répondu catégoriquement. Je te la renverrai à la première occasion. Il est fâcheux, je conviens, de recevoir les commentaires avant le texte.


1 De l’hôtel du 114, rue de l’Université dont Delacroix s’occupait d’assurer la sous-location pour Henriette et Raymond de Verninac.
2 Claude-Louis de la Châtre est député de la noblesse aux États généraux de 1789. Se rangeant du côté des intransigeants du royalisme, il émigre et combat la révolution depuis l’étranger. La Restauration consacre son retour en grâce : en 1814, il est nommé ambassadeur à Londres puis lieutenant-général et enfin pair de France. Louis XVIII en fait l’un des premiers gentilshommes de sa Chambre. Claude-Louis de la Châtre est officier de la Légion d’honneur, membre du Conseil privé et ministre d’Etat. Il est élevé au rang de duc par une ordonnance du 21 août 1817.
3 Non identifiée.
4 Marchande lingère.
5 Horloger situé au 190, rue Saint-Honoré (Journal, éd. Hannoosh, t. II, p. 1438). Voir aussi la lettre à Henriette du 30 mai 1820.
6 Comme indiqué dans le carnet de comptes qu’il tient alors, Delacroix avait payé ces bottes le 30 janvier (Journal, éd. Hannoosh, t. II, p. 1433).
7 Comme indiqué dans le carnet de comptes que Delacroix tient alors, ses dépenses du jour de l’an s’étaient élevées à 11,30 francs (Journal, éd. Hannoosh, t. II, p. 1432). Voir aussi la lettre à Henriette du 5 janvier 1820.
8 Delacroix avait payé ce clavecin 40 francs : voir la lettre à Henriette du 12 février 1820 ainsi que le carnet de comptes alors tenu par le peintre (Journal, éd. Hannoosh, t. II, p. 1435).
9 Suite à l’assassinat du duc de Berry le 13 février 1820, Élie Decazes, président du Conseil depuis novembre 1819, se voit contraint de démissionner.
10 Joubin indique qu’il serait ici question d’un certain M. Eymond (Joubin, t. V, p. 34). Sans doute confond t-il avec Claude François Eymard (1772-1859) qui fut en effet préfet de Corse à partir de 1820, mais seulement suite aux événements ici évoqués, et jusqu’en 1822. Il apparaît clairement que le personnage auquel Delacroix fait référence serait plutôt le prédécesseur d’Eymard, Alexandre Daniel de Talleyrand-Périgord (1776-1839), qui ne fut préfet de la Corse que de façon éphémère après avoir été nommé à ce poste le 15 décembre 1819.
11Il est probable qu’il soit ici question des tableaux que Delacroix peignit durant l’hiver 1819-1820 pour la maison de M. Lottin de Saint-Germain, rue de Nazareth, dans l’île de la Cité (Jobert, 1997, p. 62).
12 Delacroix indique dans son carnet de comptes avoir payé son maître d’armes 12 francs le 26 janvier puis deux écus le 26 février (Journal, éd. Hannoosh, t. II, p. 1434).
13 Ce n’est que l’année précédente, en 1819, que Delacroix réalise ses premiers essais en lithographie, passant alors, pour l’impression, par Charles Philibert de Lasteyrie (1759-1849), l’un des pionniers de la technique en France (Jobert (dir.), 1998, p. 78 et Jobert, 2000, p. 46). En outre, c’est en 1820 que Charles Motte publie pour la première fois des lithographies de l’artiste, peut-être celles dont il est question ici.
14 Charles de Verninac est alors scolarisé au Lycée impérial.
15 Probablement François de Verninac Saint-Maur (1753-1839), président de la ville et du canton de Souillac, frère de Raymond de Verninac. À ce sujet, voir aussi la lettre à Henriette du 25 février 1820.
16 L’Indépendant, journal politique, littéraire et militaire paraît du 8 mai 1819 au 13 avril 1820. Delacroix s’était déjà occupé d’abonner sa sœur à ce journal fin 1819 (voir lettre à Henriette de Verninac, fin novembre-début décembre 1819).
17 Cette somme de 44 francs, que Delacroix paie pour le livre de botanique de sa sœur, correspond à celle mentionnée dans le carnet de comptes alors tenu par l’artiste (Journal, éd. Hannoosh, t. II, p. 1435).
18 En avril, Delacroix note en effet dans son carnet de comptes qu’il lui reste à payer trois francs de courrier pour l’envoi du livre de botanique (Journal, éd. Hannoosh, t. II, p. 1435).
19 Procès de Raymond de Verninac au sujet de la forêt de Boixe.

Transcription originale

Page 1

À Madame

Madame Verninac

Page 2

Mercredi Le 1er mars 1820.

J’ai reçu hier soir ma chere sœur ta lettre du 23 fevrier. Je profite des eclaircissements
que je te donne sur les questions que charles m’a transmises, pour te parler de l’appartement.
Mon oncle est en pourparlers avec des personnes, pour la location du dit appartement
au mois d’avril. Elles n’en veulent donner decidement que 1400 fr. et il n’y a plus à
debattre que le sou pour livre du portier, que cette dame n’est pas sure de s’engager à payer.
Elle doit me rendre reponse samedi. Comme je crois que dans ta note tu l’abandonnais
pour 1400 fr. sans la condition du sou pour livre, je crois que nous pourrons en passer
par la, si la dame s’y refuse. Le bail est ce qui la retient le plus. nous avions
déjà cedé jusqu’à un bail sous seing privé, ce qui au fait est à peuprès la meme choses
avec des personnes connues, parentes tres rapprochées du duc de la Châtre et connues dans la
maison de la Duchesse de Bourbon. Ce sont les frais d’un acte par devant notaire qui la
retiennent. [un mot barré] Comme il parait que le mari est militaire et par conséquent exposé à
changer de lieu, si enfin ils ne pouvaient se décider à faire un bail, mais [un mot interlinéaire] sous la condition,
bien entendu, de s’avertir mutuellement 3 mois d’avance et de faire voir l’appartement
pendant ce temps, faudrait-il le laisser. Je n’y vois pas d’inconvenient, puisque par ce
moyen on est toujours à même de refaire un autre marché plus avantageux si on
le trouve, et qu’au moins on n’a a payer pendant ce temps ni impots ni loyer en entier.
fais moi donc savoir ce que tu penses à ce sujet.

Charles m’avait m’a [deux mots interlinéaires] donné hier la petite note où tu me fais diverses
questions et je comptais la lui t’envoyer ce petit bout de reponse avec la sienne. voici
des eclaircissements sur les choses demandées.

Mde. fortier, Mde. Oudot, Mr. Laborie n’ont pas été payés parceque je comptais le
payer
faire en même temps pour ce que je leur dois, comme nous en etions
convenus. J’avais fais quelques economies partie sur ma rente, partie sur mes mois :
je me suis donné differentes choses necessaires : Le chapeau d’abord mais plus anciennement
une paire de bottes qui m’ont couté 25 francs et dont j’ai reconnu la necessité
dans cette saison à cause de la quantité de bas que je salissais
. j’ai acheté quelques

[premier post-scriptum, verticalement, marge gauche]

P. S. Le valet de chambre de Mr. de Brancas qui était venu dans la maison m’a rappellé que mon beau frère devait à son maître [trois mots interlinéaires] les volets
de ta chambre à coucher ainsi qu’une petite porte de cave ; que le tout avait été estimé et qu’il en devait savoir le prix.

[second post-scriptum, marge supérieure]

Second Post. Scriptum. J’ai attendu la reponse definitive de la dame pour envoyer ma lettre. elle ne
peut prendre l’appartement. nous allons tacher de trouver quelqu’autre locataire.

[troisième post-scriptum, marge inférieure]

Sitôt que le toupet te sera parvenu, tu m’ecriras de suite s’il n’y a rien à y faire afin que je
paye le coiffeur. je ne lui ai donné que 12fr. – j’ai renouvellé l’abonnement à l’independant.

Page 3

paires de chaussettes pour les bottes. J’ai été obligé à quelques petites depenses au jour de
l’an, qui sont indispensables comme tu sais. j’ai reçu quelques fois chez moi le Soir
differents amis qui me temoignent de l’interet et qui me recoivent bien chez eux. J’ai
acheté une voie de bois, que je n’userai sans doute pas dans mon hiver, [deux mots barrés]
[mots barrés] tu te rappelles que nous n’avions compté que pour une demi voie. Enfin ce
sublime clavecin, ma consolation dans mes soucis et qui n’est certainement pas payé
trop cher. Je ne me le serais pas encore donné sans une raison que je te vais dire. [mot barré]
[mot barré] Un ami de Mr de Cazes, que j’ai connu chez et par Raisson, qui a connu mon père etc.
se serait chargé de me faire vendre au dit Sieur De Cazes un petit tableau que j’allais entreprendre
lorsque l’evenement du 13 fevrier est survenu ; le monsieur qui venait d’etre nommé Prefet de
la Corse a reçu ordre de partir dans les deux ou trois jours qui ont suivi, et Enfin Mr. Decazes
n’est plus ministre adieu les projets. – Je pourrais bien payer Mde Oudot etc. avec l’argent
des mes peintures que tu te rappelles que j’ai faites près du palais et dont j’attends encore le payement
mais j’avais destiné cet argent, [un mot barré] si nous avions pu y joindre quelque chose à me donner un
habit et un pantalon ; car celui qui m’a été fait à angoulême est d’un drap detestable et mal
teint. fais moi le plaisir de m’envoyer tes reflexions sur tout cela. J’oubliais de te parler du mtre d’armes
que j’ai depuis 2 mois ½. tu me diras peut-etre que je pourrais m’en passer. Je crois que cela me
serait difficile : cela me dégourdit un peu et cela dissipe le nuage triste qui me suit presque partout.
j’ai fait des lithographies qui n’ont servi qu’à me faire faire des courses et a payer le papier et le noir
de mon imprimeur.

Je suivrai tes intentions pour la declaration de [trois mots interlinéaires] l’appartement. Dis moi un peu, si [mots barrés] Les personnes qui
loueront l’appartement 1400fr. n’auront pas lieu de se formaliser de ce qu’il sera imposé comme s’il
était loué 1600. – Tu me parles dans ta lettre des travaux très lucratifs qui auraient été faits
par moi. je ne sais où tu les as pris.

Voici les notes de charles.
devoirs religieux
: cet eleve les remplit assez bien. Conduite : satisfaisante cette année. point de graves reproches à
lui faire. Santé : fort bonne. - il suit le cours de seconde il a en general témoigné beaucoup de bonne volonté
il a bien employé son temps et fait des progrès sensibles. Ses devoirs fourmillent encore de grosses fautes, tristes fruits
d’une longue paresse ; mais une application soutenue, les fera bientôt disparaitre. Il y a de la facilité dans
ses vers, mais trop de verbiage. Une elegante precision, vaut mieux que cette sterile abondance. Le latin de
ses thèmes est faible et sans couleur. Il deviendra piquant et heureux, si cet eleve met en usage tous
ses moyens. Le grec est negligé. C’est un tort qu’il faut lui reprocher vivement. histoire il s’y distinguera
il n’y va pas mal. – Il n’y a pas de comparaison entre Verninac de cette année et celui de l’année derniere
- il s’occupe du dessin avec assez de fruit. Signé Malleval –

Voila je crois des notes très satisfaisantes. Tu retrouveras l’année prochaine un savant et pardessus tout
un homme bien portant. Adieu ma chère sœur porte toi bien. fais bien mes amitiés à mon beaufrère
et remercie le bien pour moi de tout l’interet qu’il me marque dans ses lettres. je t’embrasse tendrement.

E. delacroix

La lettre que mon beau frère m’avait demandee de chercher [deux mots interlinéaires] a eté envoyée à Mr. Verninac de Souillac.

J’ai reçu la seconde lettre de change de 136 fr

Page 4

J’avais menagé autant que j’avais pu l’espace, ma chère Sœur,
parce que je comptais n’envoyer que la feuille simple avec la lettre de Charles [cinq mots interlinéaires] pour faire moins de
volume. Mais comme je me suis décidé après avoir beaucoup consulté
à t’envoyer ton livre par la poste le courrier, je profite de l’occasion
pour y glisser cette lettre. J’ai vu charles aujourd’hui : il m’a dit qu’il
t’avait ecrit dernierement. La cousine ne va pas trop bien. Son etat
m’inquiete beaucoup. tu trouveras le toupet entre les volumes, il me parait
fort bien conditionné. Les cheveux ont eté laissés un peu longs [mots barrés]
parce qu’on sera toujours à même de les Couper. L’ouvrage à couté 44fr
j’ai vu plusieurs libraires et il est impossible de l’avoir à moins.

Comme je te l’ai dit dans le second Post Scriptum placé en tête
de cette lettre, L’appartement [un mot barré] n’est point loué. Il est bien venu
plusieurs personnes pour le voir. Mais il ne parait pas qu’il a[it]
Convenu[. He]reusement nous avons encore un mois et je ne
negligerai aucune manière moyen de le louer. – Ce paquet t’arrive
par le courrier et non par sous bande comme la poste envoye les brochures.
[mots barrés] on prend 5 centimes par feuille d’impression. [mot barré] Il y a 500
pages au volume l’un dans l’autre et dans un in-8°, la feuille d’impression
ne contient que 8 pages. Tu vois que cela aurait fait plus de 3fr au volume.
et le paquet entier ne [un mot barré] coutera que cette somme. –

Adieu ma chère sœur, portes toi bien je t’embrasse bien, ainsi
que mon beau frere. S’il y a quelque chose de nouveau sur le procès, tu
m’en instruiras lorsque tu m’écriras. –

Je t’écris de la poste et la note où tu me fesais tes questions est [un mot barré] à la maison. J’y
ai repondu cattegoriquement. je te la renverrai à la premiere occasion. Il est facheux, je conviens,
de recevoir les commentaires avant le texte. –

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