Madame
Madame G. Sand
Quai Malaquais n°19

 

J’arrive, chère madame, et je vous remercie de votre invitation. Je serai chez vous tantôt à 6h n’est-ce pas ? Vous repartez donc ? Mais vous resterez peut-être ; car vous restiez il y a 15 jours ¹.

Vous avez manqué de bien peu de chose une fameuse épître de moi, après avoir achevé André², l’autre jour, et qui devait commencer par « femme admirable ! » Mais nous ne sommes pas encore assez vieux amis³ pour que j’ose être aussi ridicule avec vous, que mon humeur du moment me le fait être souvent. Peut-être un jour serai-je plus entreprenant pour vous dire tout ce que je pense d’André et de beaucoup d’autres choses encore⁴.

Adieu, chère madame, et à tantôt.

EugDelacroix

Je ne puis cependant m’empêcher de vous parler encore du joli serpent⁵. Le premier jour, j’en étais véritablement fou.

Dimanche 1 heure

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¹ Selon Françoise Alexandre, Delacroix et Sand ont des difficultés pour se rencontrer à Paris. Le peintre rentre d’un séjour à Frépillon chez ses cousins Riesener, tandis que l’écrivain, qui a renoué avec Alfred de Musset en janvier, le fuit le 6 mars à Nohant et paraît multiplier les allers et retours entre Paris et le Berry (Alexandre, 2005, p. 225, n. 1 de la page 88).
² Titre du roman de George Sand publié en livraisons dans la Revue des deux Mondes entre le 15 mars et le 1er avril 1835.
³ Delacroix avait rencontré George Sand à l’hiver 1834-1835 lorsqu’il fit, à la demande de François Buloz, son portrait.
⁴ "En avril 1835, Delacroix s’en tient encore au "chère madame" avec George Sand. Néanmoins, une certaine galanterie, certes conventionnelle, perce derrière les compliments adressés à l’auteur d’André" (Alexandre, 2005, p. 225, n. 3 de la page 88).
⁵ Cadeau de l’écrivain à Delacroix. "Le serpent" est un presse-papier en plomb de la forme de cet animal. Cet objet avait été offert à Sand par l’actrice Marie Dorval. Delacroix conserve ce serpent jusqu’à sa mort et le restitue par testament à l’écrivain. Il est actuellement conservé au musée de la Vie romantique à Paris (Alexandre, 2005, p. 225, n. 4 de la page 88).

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Madame

Madame G. Sand

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J’arrive chere madame, et je
vous remercie de votre invitation.
Je serai chez vous tantôt à 6^h. n’est-
ce pas ? Vous repartez donc ? Mais
vous resterez peut-être ; car vous restiez
il y a 15 jours. –

Vous avez manqué de bien peu de
chose une fameuse epître de moi
après avoir achevé [mot barré illisible] André l’autre
jour et qui devait commencer par
femme admirable ! – Mais nous
ne sommes pas encore assez vieux amis pour
que j’ose etre aussi ridicule avec vous
que mon humeur du moment me le fait
etre souvent – Peut être un jour serai je
plus entreprenant pour vous dire tout

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ce que je pense d’André et de
beaucoup d’autres choses encore.

Adieu chere madame et
à tantot. —

EugDelacroix

Je ne puis cependant m’empêcher
de vous parler encore du joli serpent.
Le premier jour j’en etais veritablement
fou.

Dimanche 1h